Je suis une artiste multifacettes: je fais de la photo argentique, je peins, je dessine, j'écris de la poésie. Très souvent je mêle ces différentes catégories pour créer des œuvres hybrides.
J’aime aussi créer sur des surfaces moins académiques : disques vinyles, pointes de danse, lingettes anti-transfert de couleurs, tuile de toit.
Mon travail a aussi un aspect médiumnique, j’ai créée plusieurs oracles divinatoires. Je réalise aussi des portraits d’âme : ce sont des dessins personnalisés en direct, une guidance en dessin.

Ma démarche est spontanée, énergétique, médiumnique: je ne me pose pas à l'avance en réfléchissant à comment je vais parler de ceci ou dessiner cela. Mes œuvres sont plutôt des souffles de vies alimentées par mon regard sur le quotidien, par des fascinations pour une ligne, une odeur, une lumière, par des rêves ou mes contemplations. C'est un peu comme si prenais l'air du temps, les ambiances pour en faire de la matière qui se donne à voir.

L'ensemble de mon travail est visible sur mon site: https://sofyengel.wixsite.com/monsite

​Je vis et je travaille à Nancy

Siret: 808 464 887 00013

vendredi 20 décembre 2019

C'est maintenant

Après une journée mouvementée, lorsque je savoure le moment présent, lorsque le monde me parle:


Les animaux, en dehors de leur nature n’ont rien à prouver. Ils n’ont pas besoin de prouver leur présence au monde. Ils n’ont rien à justifier, pas de place à prendre ou de traces à laisser.

Pas de bonheur, juste être.

En tant que moi je n’ai rien à prouver.

Désormais il n’y a que maintenant. Il n’y a plus d’après ni d’avant, il n’y a que maintenant. C’est maintenant que je sens mon souffle passer dans mes poumons, c’est maintenant que je peux compter mes phalanges, c’est maintenant que je ressens cette douleur à cet endroit précis, ces crispations c’est maintenant, cette vitalité de mon sang qui circule, de l’oxygène qui se transporte dans mes cellules, c’est maintenant.
©Sofy Engel

26-29 novembre 2019




mercredi 18 décembre 2019

Je suis en vie

Après une vie mouvementée, lorsque savoure le moment présent, lorsque le monde me parle:

Je suis en vie.
Et je regarde cette fourrure douce se soulever et s’affaisser au rythme d’une respiration tranquille. C’est le chat à mes pieds sur le lit, c’est Gally et son pelage en écorce.
Dans l’armoire à côté, Lullaby est cachée.
Il fait encore jour, il est passé 16h. Mais le soleil ne brille plus. Gally, tout-à-l’heure était perchée sur le meuble, se prélassant au soleil pendant sa sieste.
Le ciel est blanc et lumineux, le contour des arbres est flou, une légère brume.
Pas de bruits aujourd’hui, c’est jour de grève.
Denis dans le salon chantonne et fait cliqueter les manettes de son casque VR. Borderland je suppose.
J’entends aussi un murmure de voiture et de chauffage central. Parfois Lullaby bouge et fait grincer l’armoire. Parfois c’est mon ventre qui s’exprime en même temps que le beau bruit du stylo qui écrit.
Je suis en vie.
Gally me regarde. Lullaby a commencé un brin de toilette, je l’entends.
Dans la petite télévision des années 80 posée sur la commode, ma lampe se reflète sur l’écran gris et bombé.
Il n’y a pas de vent. Une cheminée fume. Mon rhume s’en va.
La lampe se reflète aussi dans les prunelles vertes de Gally, comme une petite étoile. Elle me regarde, l’écriture l’intrigue, elle écoute les mots dans ma tête. Ces mots elle les comprend tous, mais pas toujours les concepts qui vont avec. Ce n’est pas grave, ni pour elle, ni pour moi.
Dans les étages de l’immeuble, quelqu’un marche et fait couler de l’eau.
Je suis en vie.

©Sofy Engel

Jeudi 5 décembre 2019

dimanche 8 décembre 2019

juin 2019: La planète blanche

C’est une planète blanche. Immense et éblouissante. Des reliefs aveuglants côtoient des plateaux miroitants et des champs de pierre gorgés de chaleur. C’est comme la planète Mars, mais blanche et avec une atmosphère. Le ciel est bleu vif, inondé d’un soleil implacable qui se réverbère sur les étendues couleur de craie. Je ne sais pas où regarder.

C’est loin. Tellement loin que je ne sais pas où je suis. Dans un western incolore peut-être, aux luminances chatoyantes et nostalgiques. Les paysages s’impriment en persistance rétinienne. Je flotte sur ces étendues chaudes et grandioses. Vertiges. C’est comme un réveil, une éclosion après long rêve bienfaisant. Il me reste des franges d’ailleurs au bord de la conscience. Je ne sais pas si je viens de perdre quelque chose ou de gagner du nouveau. J’émerge d’un songe et je découvre cette réalité inconnue. Je m’étire, écrasée d’été. C’est comme si la nature était en flammes et je viens de me retrouver là, sans souvenirs du voyage.

C’est loin. Tellement loin qu’ici je ne sens même pas d’esprits.

Partout où je vais, toujours je sens des esprits. Ils sont légions dans tous les recoins de tous les univers que j’ai pu découvrir lors de mes explorations intempestives. Partout on trouve des textures à foison, des couleurs, des photons, des particules, des consciences avec ou sans formes, des espace-temps plus ou moins denses. La réalité est d’une épaisseur palpable et sans cesse renouvelée, changeante, en mouvement. J’en ai visité des mondes! Tous sont empreints d’entités, de vibrations, de formes, d’ondes.

Mais Pas ici.

C’est un monde oublié, un monde aveuglant et vide, à l’écart des flux d’énergies, des systèmes solaires, des galaxies. Uniquement le choc frontal de grands espaces inconnus, implacables et pierreux. Mais aussi chauds et doux, immobiles. A la fois reposant et vaguement inquiétant.

Ici pas d’esprits. Je le ressens comme un vide, une absence, un creux à la place du cœur car je ne perçois que le minéral aride et avare de mots, de textures et de sentiments. Pas de couleurs, à part le bleu et le blanc, et les bords noirs et fins des contours nets, rudes sous les rayons du soleil. Un soleil que je ne connais pas.

Je sens une musique cependant, à peine perceptible. Certainement celle qui m’a permis le voyage, et me permet de le poursuivre tant que dureront les notes. Ce compagnon sonore et discret reste là comme un lien. Il me centre, il me guide. C’est grâce à lui que je m’acclimate à toute cette débauche de photons. Je distingue plus de détails, je vois des grains de poussière et des petits cailloux se soulever au souffle du vent, un vent ténu et intermittent. Une poussière qui danse sur les rebords des à-pics et la surface lisse des terrains vagues. Je me concentre sur le ballet intime de ces volutes que je n’entends pas. Il n’y a que cette musique que je sens pour habiller le décor. Les poussières de pierre sautent et tombent dans un ballet sans logique. Pas de végétations ou d’océans pour évaluer la force du vent que je ne sens pas sur ma peau et mes cheveux. Pas de référentiel ni de point de comparaison. Mon sens du toucher s’est mis en retrait pour laisser à mes yeux le plaisir de m’en mettre plein la vue et de boire les étendues.

Tandis que je contemple je perçois des mouvements différents. Comme des vagues minuscules sur les surfaces de rocs vierges, qui enflent doucement pour devenir palpitations. C’est un mirage sans doute, une distorsion atmosphérique due à la chaleur. Mais dans toutes les directions, très loin où je porte mon regard, le sol semble être devenu vivant. Il tremble et se déplace, formant à peine un relief avant de s’étaler à nouveau. Ce n’est pas le vent. Je ne sais pas nommer ce que je vois, je ne connais pas ce phénomène. Le sol prend vie et s’anime de plus en plus et lentement. Je n’ai pas peur, je suis dans une extase tranquille. Je regarde intéressée, je décortique, j’apprends. Je reste longtemps hypnotisée par ce phénomène dont l’intensité s’est stabilisée. Je flotte en suspens sur la musique en regardant ce film blanc et triste qui se déroule.

En même temps, je m’aventure un peu pour aller toucher les textures de l’univers au-delà de cette planète. Sa beauté diaphane contraste avec l’obscurité du vide spatial. C’est un phare isolé au milieu de l’obscurité sidérale. Il n’y a absolument aucun autre astre à des années-lumière. Il n’y a rien, tellement rien. C’est comme une nausée. Je n’ose pas explorer de peur de me perdre et de ne plus retrouver ce point d’attache blanc et rocailleux, inhabité peut-être. Je vais retourner sur ces escarpements et voir ce que le lieu à me dire ou à me monter, quelle danse nous allons composer ensemble et quels enseignements je vais trouver.

Sur la terre ferme la danse des cailloux forme de plus en plus de creux et de bosses qui s’agitent en remous de plus en plus intenses. On dirait que le vent est un marionnettiste de sable et de roche, donnant vie à l’immensité minérale. Soudain, je distingue des traits noirs qui apparaissent depuis le sol et ondulent. Quelqu’un dessine des contours avec les rafales de vent et tracent des personnages encore abstraits. Des gribouillis taillés d’une main sûre, invisible et artistique. Aucune forme précise. les traits disparaissent par intervalles suivant le flux et le reflux des bourrasques. Ces lignes à l’encre de Chine sont aussi immenses que les plaines granitiques sur lesquelles elles s’étirent. Le contraste avec le blanc me permet de les distinguer avec une précision absolue.

Le ballet continue longtemps et le dessin change imperceptiblement. Des formes apparaissent, imprécises. Des structures informes, indéfinies, semblent se lever du sol là où juste avant elles étaient si platement étalées qu’on ne les distinguaient pas. Elles ne tiennent pas longtemps debout mais un océan de personnages flous à la taille indéfinie se matérialise. Ce n’est plus juste une petite brise de poussière. Quelque chose émerge, quelque chose de palpable qui deviendra bientôt définissable. Je suis prise d’une immense fascination et de curiosité. Qu’est-ce qui est en train de naître? Qu’est-ce qui apparaît à l’infini, à la surface des terrains vagues et des montagnes? Le sol prend vie, péniblement et par à-coup, dans toutes les directions. Une myriade de personnages abstraits m’entoure, sans faire attention à ma présence, tant occupée à prendre vie.

C’est désormais une foule de traits noirs sur le décor blanc. C’est une foule de personnages tenant à la fois de la fleur stylisée et du bonhomme dessiné sur un coin de papier. Les formes sont courbes et rondes et semblent se mettre debout. Ces personnages sont à la fois nets et précis et mouvants dans leurs contours. Ils sont en 2 dimensions mais ne paraissent pas plats. C’est une forêt de fantômes qui s’aventurent vers moi, ils arrivent de tous les côtés, je suis au centre de leur migration. Je ne ressens que de la tranquillité, comme si je regardais une représentation théâtrale. Les personnages aussi me regardent comme si c’était moi la représentation. Je les sens intrigués. Je ne sais pas comment je peux nommer ce que je vois, si contrasté et si indéfini. Ces personnages ont un visage mais n’ont pas l’air d’avoir de traits, pas vraiment de bouche ou de nez, des yeux peut-être. Ils semblent avoir des mains et se déplacent comme des roseaux qui flottent au vent. Ils sont un nombre inestimable et totalement silencieux. Ils sont exaltants. Ils se glissent vers moi et m’entourent, je suis emmitouflée dans une marée blanche. Certains passent sous moi et je me sens flotter, comme dans l’eau du bain, je regarde le plafond de ciel bleu et la décomposition des rayons du soleil derrière mes cils. Doucement ils me soulèvent et je ressens certaines de leurs émotions. Ils se rassemblent de toute part de toute la surface de cette planète pour converger vers moi. Que suis-je? Qui suis-je? Comment suis-je arrivée là? Ils sont un seul organisme constitué de milliards d’individualités, à l’égo dilué dans la multitude et l’indolence propre à ce monde.

Il ya comme des remous qui m’entourent, comme des massages, des vagues de mouvement. Je suis sur des rails faits de personnages de papier solide. Ils me transportent, ils m'emmènent. Je suis couchée sur eux, j’entends leurs vibrations de vies silencieuses et de vent. Nous nous déplaçons, leur contact sur ma peau est comme une brise. Je me sens comme dans un lit qui vient d’être fait, aux draps propres et sans plis, au moelleux de nuages et de senteurs de prairies. C’est un ravissement.

Ils me posent en leur centre, le visage est plus précis mais il ne comporte que des yeux, ronds et curieux, comme ceux d’un chat avec des accents de philosophie. Ils ont des bras très fins et des mains qui ressemblent à de grandes feuilles d’arbres. Ils n’ont pas de jambes, ni de pieds. leur corps ne commencent pas sur le sol mais ils ont plutôt l’air d’en émerger, comme une plante dans un champ.

Je comprends qu’ils veulent me parler. leur regard est braqué sur moi, sur mon regard qu’ils cherchent à capter. L’intensité de l’échange dure une éternité, ou bien quelques secondes. Ils se tiennent ensuite tous par leur main-feuille et les plus proches les posent sur moi. La musique lointaine devient un rythme binaural, au volume très bas mais insistant. Ce rythme s’accroche à ma concentration, mon attention, mes perceptions. Il emplit ma tête, mon esprit et mon corps. Le son devient lumière, un peu fluorescente sur le blanc environnant, des nervures brillantes et fluorescentes sous forme d’informations. Je ressens l’éternité de ces créatures, leur amitié avec le vent et la pierre, leur découverte de tant couleurs qui se trouvent dans ma mémoire et pas dans la leur. Ils sont le paysage et le son de la vie, ils sont le roc et l’ici et maintenant qui dure depuis toujours sans que rien ne bouleverse le cours des événements. Ils n’ont pas de nom, ignorent le concept d’identité et d’espèce. Ils emmagasinent ce que je suis, l’humain, sa culture, La Terre. Ils ne feront rien de tout cela mais le garderont précieusement comme lorsqu’on ramasse un caillou ou une feuille parce qu’on les trouve beau. Ils ont un nouveau trésor dans la bibliothèque bienheureuse, intense et calme de leur existence. Ils pourront quand bon leur semble, caresser de leurs émotions ces concepts et ces réalités. Ils viendra alors peut-être une bouche pour esquisser un sourire de bonheur avant de s’étaler à nouveau sur la pierre et s’y fondre jusqu’à la prochaine bourrasque.

Ils me transportent toujours et me déplacent encore. Nous arrivons en masse virevoltante vers un arbre. Pas très grand, blanc aux traits noirs, du même graphisme que toutes ces créatures qui me portent en sensations de coussinets de chats, délicats et doux sur ma peau, avec l’intensité d’un félin. L’arbre a une forme d’arbre mais son regard intérieur, qu’il porte sur mon âme est le même que celui de tous ces personnages. Se sentir regardé par un arbre, quelle agréable sensation. Toute l’assemblée me fait comprendre que c’est un échange, un remerciement pour ma présence et mes informations. Ils vont me connecter à l’arbre, qui est le coeur de leur population, leur coeur vibrant et pulsant. Ses battements que j’entends même si ce ne sont pas de vrais sons mais des intentions de sons, redoublent de fréquence et de volume.

Je touche l’arbre qui devient vibrant et luminescent. Tous les traits, tous les contours deviennent des lignes lumineuses sur fond de nuit. Ce sont les connexions de consciences, un tissage de lumières qui s’étirent à l’infini. J’entends toutes les musiques, tous les chants, toutes les souffrances et toutes les joies. C’est une sidération immense qui dure longtemps et une seconde en même temps.

Je sursaute! Je suis dans mon lit, de retour à ma réalité. Mais je pourrai revenir, comme je le souhaite, sur la planète blanche.